Comme beaucoup d’entre vous, nous avons suivi le feuilleton de la wildcard en Supersport Mondial offerte par le GMT 94, la FFM et Yamaha France.

À l’issue du weekend FSBK à Magny-Cours, c’est donc Valentin Debise qui se voit offrir la possibilité d’affronter gratuitement tous les ténors du mondial que sont Dominique Aegerter, Steven Odendaal, Philipp Öttl et Jules Cluzel, le tout sur la meilleure machine de la catégorie, une Yamaha R6 du team GMT94.

L’événement aura lieu le 5 septembre à Magny-Cours, ce qui nous laisse le temps de continuer à observer cette heureuse initiative, mais, avant cela, nous avons fait le point avec Christophe Guyot dès que le nom de l’heureux élu a été entériné.

Si la situation sur la piste était relativement claire, Valentin Debise remportant au final 9 des 10 courses auxquelles il a participé, se posait quand même la question de savoir si le projet destiné avant tout à motiver et a aider les jeunes pilotes n’était pas quelque peu dénaturé par la sélection d’un pilote expérimenté…

Heureusement, seul le sport est sorti grand vainqueur de cette réflexion, avec tous les aspects extrêmement positifs que cela comporte !


Christophe Guyot : « Je suis vraiment content car le projet a redynamisé le championnat de France FSBK. Valentin Debise n’est venu que pour ça, pour gagner la wildcard, mais Tom Bercot aussi, Ludovic Cauchi aussi, ainsi que beaucoup d’autres jeunes car le projet reste résolument à destination de la jeunesse : On a pu constater que beaucoup de jeunes se retrouvaient en championnat national avec cet espoir de gagner la wildcard, et en même temps on a eu beaucoup de parents qui ont félicité Rémi (Guyot) ou moi parce qu’ils se sont rendus compte que grâce au projet et à Valentin Debise, le niveau a été relevé cette année. Il est relevé cette année et ça le pousse vers le haut !
Bien sûr, il y a des déceptions. Je ne cache pas que Ludovic Cauchi, qui a gagné une course, espérait remporter cette wildcard et disposait de sérieux arguments avec sa vitesse et sa jeunesse, voire même la marque de sa moto.
Alors pourquoi sélectionner un pilote de 29 ans roulant sur une Kawasaki ? Avant tout parce que la règle avait été clairement énoncée en début de saison, mais aussi parce qu’on veut mettre en avant les valeurs du sport de haut niveau ! On veut que ce soit la récompense sportive seule et qu’il n’y ait aucune considération marketing, aucun autre critère que le résultat du sport. »

 Respecter une règle clairement énoncée fait aussi partie des bases du métier de pilote de haut niveau…

« Absolument ! Après, une règle c’est toujours un peu dur, mais c’est comme ça. Et en même temps, l’autre raison pour laquelle cela reste un projet résolument tourné vers les jeunes, et c’est aussi pour ça que cela me plaît que Valentin Debise ait été sélectionné et que je ne suis pas déçu, c’est qu’il est important de donner comme message à un jeune de 15, 16 ou 17 ans que tu n’es pas vieux à 29 ans. Tu peux continuer à courir et viser un titre de champion du monde. Jules Cluzel a 32 ans, Sylvain Guintoli a été Champion du monde Superbike à 32 ans et vient de gagner les 24 Heures Motos à 39 ans ! Il est donc important de donner cet espoir de longévité à des jeunes qui veulent devenir professionnels. Et plus simplement, aujourd’hui Valentin Debise s’est montré le meilleur, donc on le prend. »

Valentin Debise s’est montré le plus rapide mais a aussi fait preuve à la fois de volonté et d’innovation en se lançant dans un programme extrêmement chargé avec de sérieuses allures de  » privé « . C’est aussi un beau message à destination de la jeunesse: « aide-toi et le ciel t’aidera »

« Rémi me rappelait que sa Kawasaki compte 120 chevaux alors qu’une Yamaha R6 fait entre 130 et 134. La Yamaha est la meilleure moto et c’est pour ça qu’elle remplit les plateaux. Valentin Debise vient avec une Kawa : On ne va quand même pas le virer (rires) !
D’un côté on critique un peu le championnat Supersport mondial, ou même France, car il y a une grande concentration de Yamaha R6. C’est vrai que c’est une excellente moto, la meilleure pour débuter, la meilleure pour gagner. Alors quelqu’un qui vient et qui gagne avec une Kawa, bravo ! »

 L’opération est donc un succès, ne serait-ce que parce qu’elle attire fortement la lumière sur le FSBK 600. On peut donc supposer qu’elle sera reconduite l’année prochaine ?

« De toute façon, oui ! Ce sera reconduit l’année prochaine ! On ne peut pas donner de l’envie comme ça puis arrêter. On peut noter quelque chose de très important : Le championnat de France Supersport est depuis le début de l’année le championnat qui recueille le plus de pilotes Supersport dans le monde ! Ce n’est pas un hasard. On est par exemple sollicité par Lukáš Pešek en République tchèque et par Oscar Gutierrez en Espagne. Ça donne des envies, ça donne des émulations, et ce projet peut devenir un modèle demain dans d’autres pays aussi. Donner plus d’espoir que ce système où si tu n’as pas 200 000 €, tu n’as aucune chance d’aller en Mondial Supersport avec un titre de champion national. Bien sûr, il ne s’agit que d’une seule course, mais imaginons que Valentin brille à Magny-Cours ! Comment ça pourrait ne pas l’aider à être soutenu pour être permanent l’année suivante en championnat du monde ? Rien n’est certain bien sûr, mais c’est une belle opportunité.
Bien sûr, on aurait pu faire une règle uniquement à destination des jeunes. Il y a vraiment de très bonnes choses chez Ludovic, qui est devenu cette année le plus jeune vainqueur de l’histoire du FSBK en 600. Il a mené plusieurs courses, il a démontré un vrai talent. Nous étions prêts à l’aider aussi. Mais pour Adrien Morillas, son coach, il en manque encore un peu.  Si c’est pour faire 25e ou 30e en Supersport mondial, et c’est très facile, faut il le faire ? Entre la frustration de ne pas le faire et la déception de pas pouvoir se mettre en avant, il faut aussi savoir attendre, tant qu’on n’est pas prêt. Je pense qu’Adrien a raison de vouloir d’abord aider Ludo à accéder au niveau de Valentin. »

Comme tous les passionnés, nous sommes impatients. Peut-on, et doit-on, essayer de s’imaginer ce que peut faire Valentin Debise lors de la manche française du championnat du monde ?

« Je parle sous couvert de Rémi qui s’est beaucoup impliqué cette année pour ce projet, puisqu’il est allé voir les jeunes, il est allé à l’ouverture du championnat au Mans et il a un regard intéressant. Nous avons regardé les chronos et ça roulait en 1’43 pour Debise en championnat de France. C’est très vite, avec la moto qu’il a ! Mais il roule avec des Michelin, quand les meilleurs jeunes ont des Pirelli ce qui rend difficile d’évaluer ou se situent les écarts de chronos. Je reste quand même assez confiant et je trouve qu’il a le niveau. On en saura beaucoup plus prochainement car on va rouler avec lui à Carole. Là, on a nos références. On a déjà roulé avec Jules Cluzel, Caricasulo, Krummenacher, Perolari, etc. On aura ainsi rapidement une idée beaucoup plus précise de ce qu’on peut espérer. Attention cependant à ne pas s’emballer.  Cette année, le niveau n’est pas plus élevé qu’avant mais le nombre de pilotes très bons est beaucoup plus important. Il est donc très compliqué de se fixer un objectif, même si on a tous envie de rêver. »

Dans un sens, cette wildcard est un magnifique cadeau, mais aussi un cadeau empoisonné : Il s’agit d’une chance à ne pas laisser passer lors d’un unique weekend, avec tout le stress que cela peut engendrer. A vouloir très bien faire, on en fait parfois un peu trop…

« Valentin a maintenant de l’expérience et il a beaucoup changé. S’il a attendu l’âge de 29 ans pour arriver là où il est maintenant, alors que ça fait longtemps qu’il va vite, c’est qu’il lui a manqué d’autres choses, dans son comportement et sa façon de voir les choses. Il a gagné en maturité et il n’est jamais trop tard. Le sport doit rester la règle et on peut redonner une chance à quelqu’un même si on pense qu’il l’a peut-être laissée passer à un moment ou un autre.
Là, il est d’une motivation extrême. Je l’ai eu il y a trois jours en lui demandant s’il prenait la wildcard au cas où il la gagne. Il m’a répondu : « Christophe, je n’ai fait ça que pour ça, que pour ça ! ». Il n’a monté sa structure que pour ça ! Honnêtement, même s’il ne le dira pas parce qu’il a compris beaucoup de choses, il n’ira pas à Magny-Cours pour faire dixième. Il sait qu’il a une moto qui a gagné trois courses aux mains de Jules Cluzel et qui a fait 15 podiums chez nous en deux ans et demi. Il ne pense qu’à ça…
Après, c’est très juste, c’est un weekend unique et c’est très dur. C’est aussi pour ça que c’est plutôt bien que ce soit Valentin, car il a une expérience derrière lui. Le cadeau que l’on remet est effectivement difficile, car avoir la même moto que Jules est une sacrée pression. Nous, on n’en met pas, mais c’est obligé qu’il s’en mette. »

Dernière chose, on doit quand même remercier, en plus du GMT94, la FFM et Yamaha France, non seulement pour avoir été parties prenantes de cette opération, mais aussi pour l’avoir menée à bien avec l’essence même des valeurs sportives…

« C’est effectivement super que tous les partenaires du GMT 94, il y en a une cinquantaine, aient suivi le projet. On peut aussi évidemment citer Sébastien Poirier, le président de la FFM, convaincu que le FSBK peut aussi être une marche vers le haut niveau. Il encourage le projet malgré le fait que tout le monde souhaiterait voir un jeune éclore tout de suite. Il aide à prendre le temps. Il sait que le principe de la règle exclusivement sportive, ne peut que donner espoir et envie à la jeunesse. Il a également aidé les jeunes cette année en offrant un stage de pilotage à Carole, et il y en aura d’autres à Alès, pour les aider à hausser le niveau de jeu. On doit aussi remercier Yamaha, Éric de Seynes, Vincent Thommeret, François Tarrou, Laurent Sancier, car ils m’aident à récompenser quand même un pilote Kawa. Mais c’est aussi la raison pour laquelle on est avec eux depuis si longtemps : On fait du sport et on récompense le meilleur ! Tout simplement. »

 

General / Atmosphere / Divers
WSBK France 2019 (Circuit Magny Cours)
27-29.09.2019
PSP / Mateusz Jagielski
www.photoPSP.com

Photo ouverture : Gérard Délio