Récemment, nous sommes revenus sur le statut d’Andrea Dovizioso. Et si nous avons conclu qu’il n’a pas l’étoffe d’une légende, constat que vous semblez partager. Mais il ne faut pas oublier ses grandes performances en MotoGP. Nous avons tous en tête sa saison 2017, l’explication à Motegi et la finale à Valence. En 2019, personne n’a oublié son effort à Spielberg, lorsqu’il prit le meilleur sur Marc Márquez dans le dernier virage. Mais sa carrière est plus longue que cela ! En effet, l’Italien compte 14 saisons en catégorie reine. Bien avant « Desmodovi », Dovizioso était tout aussi dangereux. En voici l’exemple.

Arrivé en MotoGP en 2008, Andrea se fait remarquer. Il pilote une Honda RC212V pour le Scot Racing Team, équipe satellite avec laquelle il avait remporté son titre de champion du monde 125cc en 2004. Sa régularité dans la performance saute aux yeux. Il ne commet jamais d’erreur, et s’offre même un podium en Malaisie. Sur une 800cc moins performante, il arrive à talonner le double champion 250cc en titre Jorge Lorenzo, alors que ce dernier était au guidon d’une Yamaha officielle. Un bel effort.

Cette campagne réussie lui ouvrit les portes de la plus prestigieuse des institutions : Repsol Honda Team. En lieu et place d’un Nicky Hayden en perte de vitesse, l’Italien prend ses marques aux côtés de Dani Pedrosa, un des futurs cracks de la catégorie. Malgré quelques erreurs qu’il ne commettait pas auparavant, Dovizioso reste parmi les meilleurs. Il s’offre même sa première victoire à Donington. Son profil est très prometteur. Il progresse de nouveau en 2010, et monte sur le podium à sept reprises sans jamais s’imposer.

Pour 2011, Repsol Honda annonce la signature de Casey Stoner, la superstar australienne en provenance de chez Ducati. La firme italienne avait nettement régressé depuis son sacre en 2007, mais voyait en Valentino Rossi l’homme providentiel. Pour ceux qui s’en souviennent, cette signature était vue comme l’une des plus importantes de l’histoire. Honda décide de monter une équipe avec trois machines officielles, sans sacrifier personne. Cela rappelait logiquement le fantastique trio Doohan Crivillé Okada du milieu des années 1990. De par son prestige, son statut d’épouvantail et ses moyens colossaux, Honda pouvait se le permettre : Une époque révolue.

 

Grande. Ici au Grand Prix de Grande-Bretagne 2011. Photo : Box Repsol

 

Toujours est-il que la marque ailée disposait de trois top-pilotes, et chacun pouvait jouer le titre avec peut-être une réserve pour Dovizioso. Car oui, s’il affichait une régularité exemplaire, sa vitesse, son génie et son incisivité n’étaient pas au niveau de ses deux coéquipiers. Par le fait, on l’imaginait moins fort. Pourtant, il réalisa une année exceptionnelle.

Au Qatar, Dovi’ termine quatrième, un classement qu’il connaît déjà. C’est sa treizième quatrième place en seulement trois saisons, ce qui reflète assez bien sa place dans la hiérarchie. Pour jouer devant, il faut passer un cap. Malheureusement, un problème de pneus le plombe à Jerez. Puis, le festival commence. Au Mans, soit deux manches plus tard, il effectue une course brillante. Après s’être englué dans le peloton, Dovizioso passe la démultipliée. Au freinage du Garage Vert, il enrhume Jorge Lorenzo mais ne s’en défait pas complètement. Valentino Rossi, à l’aise, est aussi dans les parages.

Les chutes changent la donne. L’accrochage entre Marco Simoncelli et Dani Pedrosa, comme la chute de Crutchlow ponctuent cette édition mémorable du Grand Prix de France. Stoner, seul en tête, est irrattrapable. Dovi, quatrième, repasse de nouveau Rossi puis Lorenzo, en perdition. Au bout de l’effort, il termine deuxième. Une superbe performance, qui, une fois de plus, n’est pas récompensée par la victoire.

Finalement, cette dernière phrase pourrait bien résumer sa saison 2011. Malgré six autres podiums dont trois deuxièmes places, Dovi n’entendra pas l’hymne italien retentir cette année. Mais on ne peut que féliciter sa constance exemplaire, alors que les 800cc, dont c’était la dernière année d’exploitation, ne facilitaient pas la tâche. Plus d’un pilote s’est fait piéger, et parfois avec de graves conséquences. L’accrochage entre « Super Sic » et Pedrosa au Chemin aux Bœufs eut raison de la clavicule de l’Espagnol. Ce terrible fait de course l’écarta des circuits pour plusieurs semaines. Jorge Lorenzo, pourtant assez sage, perdit un bout de doigt lors d’une chute aux essais à Phillip Island, attribuant donc le titre de champion à Casey Stoner.

 

Dovi’ a toujours été à l’aise sur le mouillé. Mais malgré de très bonnes performances, un génial australien l’éclipsa. Photo : Box Repsol

 


Dovizioso profita grandement de ces mésaventures. Comme Casey, il n’enregistra qu’un seul abandon, à Aragón. Cela le propulsa en troisième place du classement général, devant Pedrosa. Rendez-vous compte : Hormis son problème pneumatique à Jerez, Andrea n’a jamais quitté le top 5 lorsqu’il voyait l’arrivée (15 fois en 16 courses) !

Certes, l’époque était différente, et les pilotes d’usine étaient grandement avantagés par rapport aux privés, c’est un fait. De plus, la grille était relativement pauvre en engagements. Mais Dovizioso a réussi à se démarquer de la sorte dans ce qui était, sans doute, la période la plus difficile pour s’imposer de toute l’histoire moderne (soit depuis 1980). C’est un autre débat, et nous sommes curieux de voir ce que vous en pensez en commentaires.

Andrea Dovizioso n’est pas une légende , nous sommes d’accord là-dessus. Mais lors de cette saison 2011 et ce Grand Prix de France en particulier, l’Italien avait le cœur d’un champion du monde. A posteriori, on pourrait critiquer cette approche trop conservatrice. D’ailleurs, lors de la conférence de presse post Le Mans, il confiait (déjà) penser au championnat. S’il avait plus osé, peut-être que l’histoire aurait été différente mais il aurait potentiellement manqué des courses pour blessure. Ceci reste de la science-fiction.

Toujours est-il que Honda préféra le pur produit espagnol Dani Pedrosa, et bien sûr Stoner, champion en titre, pour la saison 2012. Cela n’empêcha pas Dovizioso de rebondir chez Tech3 puis Ducati, pour avoir la carrière qu’on lui connaît. Vous rappelez-vous de sa saison 2011 ? Dites-le nous en commentaires, et joyeux réveillon à vous !

 

2011 ou 2017 ? Même s’il était plus proche du titre en 2017, il y a débat. Photo : Box Repsol

Photo de couverture : Box Repsol